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Inquiétude, frustration et détresse sont des maux auxquels les femmes sont généralement exposées du début de leur grossesse jusqu’à l’accouchement. Elles sont nombreuses à perdre la vie en donnant une autre depuis des décennies et cela continue de nos jours malgré les progrès de la médecine. Beaucoup commencent maintenant à s’interroger sur la mortalité maternelle. Des erreurs médicales, des manquements à la déontologie, la négligence, une mauvaise prise en charge et même des violences obstétricales sont entre autre relatés lors des témoignages.

« Ça suffit, ça ne peut plus continuer », « Pourquoi tant de mort alors que la plupart des causes sont évitables ? », « Il est temps de mettre fin aux violences obstétricales », « Cette situation n’est plus acceptable » : Voilà entre autre des phrases qui circulent actuellement sur les réseaux sociaux et dans les causeries au ‘’grin’’ ou ailleurs. Tout a commencé suite aux décès de quelques femmes, survenus lors de leur accouchement au même moment, notamment celui de la journaliste Togola Hawa Semega, directrice de Kunafoni. Ce décès a ému plusieurs personnes, et des campagnes contre la mortalité maternelle ont été lancées sur les réseaux sociaux. Cela conduisit à la création du mouvement LA VIE EST SACREE, un mouvement pour parler des erreurs obstétricales. Des publications avec hashtags #lavieestsacrée et des profils décorés avec l’image d’une femme enceinte dont une partie représente carte de l’Afrique étaient remarquables sur les fils d’actualités des toiles.

Selon l’Enquête démographique et de santé (EDS) 2018, sur 100 000 naissances, 325 femmes ont perdu la vie en la donnant au Mali. La plupart des causes ne peuvent-elles pas être évitées ? Beaucoup pensent que OUI, car pour eux c’est une situation inacceptable. Aujourd’hui, c’est toute une chaine de suivi d’une grossesse dans les structures de santé qui est remise en cause par l’opinion publique malienne. La cause en est la mortalité maternelle qui est assez répandue.

Des causes diverses

Si l’on se réfère aux différents témoignages, on constate que les causes de la mortalité maternelle sont nombreuses. Les problèmes de sang (hémorragie et anémie) peuvent être recensés comme l’une des premières causes les plus fréquentes. Selon le rapport de surveillance de la mortalité maternelle 2020, ils constituent les principales causes de décès. La Sage-femme Korotimi Dembélé, de l’Asacoma explique que la mortalité en couche relève de beaucoup de facteurs, mais que « les hémorragies après l’accouchement sont les plus fréquentes. C’est ce qui est appelé hémorragie du post partum ». Ensuite comme d’autres principales causes, elle ajoute les embolies pulmonaires et amniotiques, les complications liées à l’hypertension artérielle et les infections. La complication de l’anesthésie pour les césariennes est aussi fréquente. Parmi les causes de décès maternel, on cite également le recours tardif aux soins dû manque adéquat de transport ou au retard dans la prise en charge pendant la grossesse ou dans les 42 jours suivants l’accouchement.

Le problème de formation des agents de santé qui s’occupent du suivi des femmes aussi bien avant qu’après l’accouchement est considéré aussi comme une cause principale de la mortalité maternelle. Selon Docteur Ousmane LY, responsable communication et formation conseil national de l’ordre des médecins du Mali, « Il y a un manque d’accès à la formation ». Il explique par là qu’il y a un problème de régulation d’ouverture d’écoles de santé, « les écoles de santé s’ouvrent comme des boutiques dans le quartier et sans remplir toutes les conditions ». Ce qui fait que certaines écoles ne répondent pas aux normes. Pour lui « La clé est la formation continue, qui permet de s’améliorer et de ne pas tomber dans la routine ».

Dr Ly a également parlé de la « faute professionnelle dans laquelle peut se retrouver l’erreur de soin ou l’erreur médicale » et aussi des manquements à la déontologie. A cela s’ajoutent d’autres facteurs. Mme Ina TALL, co-fondatrice du mouvement ‘’la vie est sacrée’’ déclare lors de son passage sur le plateau de ‘’Mali Talk Show’’ (une émission de TM1), que la plupart des témoignages qu’elles reçoivent au sein du mouvement proviennent généralement de la négligence dans la prise en charge des femmes, de la mauvaise prise en charge, de violences obstétricales, des erreurs et des négligences médicales et une insuffisance de formation au niveau des sages-femmes et infirmiers. « Il y a une insuffisance de niveau et de formation continue » annonce Mme TALL. Pour elle, la formation du personnel de santé et l’existence de nombreuses structures privées avec des agents « formés n’importe comment », dans des écoles qui ne respectent pas souvent les normes de formation exigées pour l’exercice du métier, constitue une véritable « plaie » dans ce domaine. Selon. Dr Ly et Mme TALL, les « fautes professionnelles » doivent être dénoncées.

En plus de Dr LY, Mme Magassouba Mounina SYLLA aussi, maitresse sage-femme au CSRef de la commune VI, a expliqué que si le taux de mortalité maternelle reste toujours élevé, malgré la présence de personnel qualifié, ce qu’il y a certainement « un manque de conscience professionnelle et d’amour du métier », alors qu’elle trouve le métier de sage-femme est un ‘’métier noble’’.

Plusieurs témoignages de femmes mentionnent également les violences obstétricales, surtout verbales comme des actes pouvant conduire au décès maternel. « Le jour de mon accouchement, la sage-femme m’a traité de peureuse, parce qu’elle pensait que je pouvais accoucher sans césarienne. J’ai failli laisser ma vie, si ce n’était l’intervention d’un gynécologue qui a exigé l’accouchement par césarienne » se souvient Assan Barry en pensant à l’accouchement de son premier enfant.

Il faut aussi noter l’insuffisance du plateau technique. Si, en principe, en plus de la sage-femme dans la salle d’accouchement, la présence d’autres personnels, comme un gynécologue, un infirmier obstétricien et même un pédiatre est nécessaire, cela n’est pas toujours le cas dans la pratique. Même si la tendance est actuellement à la présence de ce personnel qualifié, y compris dans les CSCOM

La sage-femme Korotimi Dembélé aussi a évoqué comme cause du décès maternel « le manque de suivi de beaucoup de femmes enceintes (du début de la grossesse jusqu’au 42 ème jour après l’accouchement) soit à cause du manque de moyens ou de la négligence de la part des femmes elles-mêmes, ou encore du manque de sages-femmes surtout dans les zones rurales ». Chargée de la surveillance de la femme, de la grossesse à la période ‘’post natale’’ en passant par l’accouchement, la sage-femme joue un rôle central dans le dispositif de suivi des femmes enceintes. C’est à elle notamment qu’incombe le dépistage des pathologies susceptibles de représenter un risque pour la grossesse. Mais ces tâches sont souvent exécutées par des matrones ou des infirmiers qui n’ont pas la qualification nécessaire.

A toutes ces causes il faut ajouter le manque d’infrastructures, plus précisément dans les zones rurales.

Innover pour faire face

Pour la sensibilisation et la libération de la parole autour de la mortalité maternelle, des violences, des erreurs et des négligences médicales, le mouvement « La vie est sacrée », a été créé. Né il y a juste environ un mois, l’objectif du mouvement selon Mme TALL est « de briser les tabous autour de la relation médecin-patient, autour des erreurs médicales et de la mauvaise conduite des personnels de santé ».

Espérons que ce mouvement jouera un rôle important dans la sensibilisation de la société sur les décès maternels, dans la prise de sanctions suite aux manquements à la déontologie et contribuera ainsi à faire baisser le taux de mortalité maternelle.

Koumba Coulibaly

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